centenaire

1914-2014. Un siècle, celui des extrêmes, nous sépare de la grande boucherie. Je n’ai pas prémédité la sortie du film et du livre en fonction d’un calendrier funèbre. Ni Patria obscura ni Patria lucida ne sont des objets de commémorations. Mais le hasard, écrivait Chris Marker, a des intuitions qu’il ne faut pas prendre pour des coïncidences.

 

Les yeux à hauteur du sol, le nez dans la terre je sillonne la campagne autour de La Boisselle. Je cherche le visage d’Albert. J’observe les détails d’une géographie qui garde la mémoire des hommes. Le ciel dense, le sol humide, les résidus végétaux, les fragments minéraux me racontent le froid de l’attente, la peur avant l’assaut, l’angoisse de la disparition. Une histoire marquée au fer sur la peau de la terre.

Un chirurgien de la Somme m’a confié une collection de plaque de verres. Faces trouées, mâchoires broyées, je rapproche les Gueules cassées des paysages de La Boisselle. J’associe chacun à un coin de terre, je leur choisis une sépulture argentique. Je réalise peut-être le deuil que Berthe, mon arrière grand-mère, n’aura jamais consenti. L’impossible deuil d’Albert, mort inutilement pour la Patrie sans laisser la moindre trace.



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