le livre

Patria lucida est un livre de photos et de textes de 180 pages, de Stéphane Ragot et Pierre Bergounioux
format 20×28 cm, édité par Le Bord de l’eau et Les Films du Jeudi. 30€.
Patria lucida et Patria obscura sont les deux faces d’un même examen du passé, entre désir d’identité et refus d’injonction identitaire.

 

Le manuscrit est lauréat de la bourse Brouillon d’un rêve d’écriture de la SCAM et a reçu le soutien à l’édition de la région Limousin.

« Les temps étaient accomplis, l’heure venue, pour le rejeton d’une lignée de militaires de carrière, de faire retour sur les trois générations qui sont l’éternité ici-bas. Ce sont les innocents de 1968, devenus grands, qui s’enfoncent les yeux ouverts dans un passé dont l’étreinte s’est desserrée en cette année fameuse. La loi de l’histoire que nous écrivons, vaille que vaille, nous oblige à prendre acte des chapitres précédents pour ne pas les répéter. C’est à cette condition que nous inventerons celui qu’il nous incombe de rédiger. »

Pierre Bergounioux


 

J’ai découvert tardivement l’œuvre de Pierre Bergounioux. C’était à l’automne 2007, je pressentais que mon travail de collecte photographique, mené des années durant, touchait à sa fin. La lecture des Carnets de notes ne m’a pas seulement ouvert la porte d’une œuvre titanesque, elle m’a convaincu de la nécessité d’actualiser mon regard sur les centaines de planches contact, les milliers de photographies récoltées avec mon vieux 6×6. « Le fait de voir une chose pour ce qu’elle est change la chose, change le monde, et nous change. Ce qui nous accablait, nous aliénait, perd de son pouvoir. Le monde n’est ce qu’il est que parce qu’il inclut l’idée qu’on se fait de lui. » J’étais sidéré par l’ampleur du projet littéraire d’un écrivain habité par la question des origines : déchiffrer l’énigme du monde, interroger l’existence soumise au travail du temps. Bergounioux me persuadait de tenir. Alors j’ai vu, incrédule, les images du passé comme épinglées au mur, mises à distance du tréfonds, couchées dans les deux dimensions des photos. C’en était fini du ramassis de douleurs et de hontes qui m’accablaient. Le temps était venu de regarder en face l’histoire dont j’étais l’héritier. Mon double désir était inavouable. Non, je ne me trompais pas d’objet, non je ne confondais pas les formes. Je ferai un film et je ferai un livre.

J’ai fait part à Pierre Bergounioux de cette double forme dont j’avais rêvé, Nous avons imaginé un livre ensemble, Patria lucida, un travail complice autour des photos carrées, une sorte de face-à-face. Il y a le récit de celui qui voit. C’est le récit à la première personne d’un photographe qui tourne l’objectif vers lui, qui rassemble les traces d’un passé mal assumé. Il y a le regard posé sur celui qui voit. Bergounioux éclaire l’intime d’une lumière universelle, il relie nos petites vies aux mouvements de l’histoire.

Le livre est en vente ou à la commande dans toutes les bonnes librairies, et disponible en ligne ici ou ou ailleurs…

(photos Emmanuel Schmitt)